Le texte, véritablement libre

C’est en écrivant que l’on apprend à écrire.

Pour moi le texte libre, doit être véritablement libre, tout comme le pronait C. Freinet ou encore Paul Le Bohec (et certainement d’autres).

Pratique importante de la pédagogie Freinet, le texte libre est devenu un prétexte pour faire des exercices et travailler la grammaire et l’orthographe dans de nombreuses classes. Les toilettages de texte, et autres codages des textes pour que les enfants puissent se corriger sont pour moi contre productives.

Extrait du texte libre de Célestin Freinet

LE TEXTE LIBRE DOIT ÊTRE VRAIMENT LIBRE
 Il semblera que nous émettions là une évidence superflue.
C’est que la tradition scolastique est si tenace, elle a si définitivement marqué la majorité des maîtres, elle a si peu confiance en l’enfant qu’on veut bien, si les officiels le recommandent, laisser écrire des textes libres… mais vous comprenez, il faut bien orienter les enfants vers les sujets à examiner ou à développer… Nous n’allons pas leur laisser écrire n’importe quoi…
Alors, on fait texte libre, comme on faisait naguère la rédaction imposée. On demande aux enfants d’écrire, à heure fixe, un texte libre. C’est-à-dire qu’au lieu de leur donner le sujet de rédaction, on leur laisse le choix de ce sujet. Cet exercice devrait s’appeler plutôt : Rédaction à sujet libre.
Si, à ce moment-là, l’enfant n’a pas envie d’écrire, il devra écrire tout de même; s’il n’a pas dans la tête un sujet passionnant, il faudra qu’il le trouve. Ou on le lui soufflera.
Et les rédactions ainsi obtenues seront peut-être lues, mais sans plus. Elles seront corrigées et recopiées sur un cahier spécial, ce qui peut avoir déjà quelques vertus scolaires et humaines.
On comprend cependant qu’une telle technique de travail, si elle est en progrès sur la pratique traditionnelle de la rédaction imposée, n’apportera que très exceptionnellement les avantages majeurs que nous reconnaîtrons au texte libre : spontanéité, création, vie, liaison intime et permanente avec le milieu, expression profonde de l’enfant.
Un texte libre doit être vraiment libre. C’est-à-dire qu’on l’écrit lorsqu’on a quelque chose à dire, lorsqu’on éprouve le besoin d’exprimer, par la plume ou le dessin, ce qui bouillonne en nous.
L’enfant écrira son texte spontané sur un coin de la table le soir ; sur ses genoux, en écoutant parler la grand-mère qui ressuscite pour lui les histoires étonnantes du temps passé ; sur le cartable, avant d’entrer en classe et aussi, naturellement, pendant les heures de travail libre que nous réservons dans notre emploi du temps.
Alors, nous aurons la certitude que les textes obtenus sont bien, à l’image de la vie, ceux qui ont le plus agité les enfants, ceux qui les ont intéressés le plus profondément, ceux donc qui auront pour nous la plus éminente vertu pédagogique.
Mais alors diront les collègues qui n’ont pas encore expérimenté, nous nous mettons ainsi à la remorque des enfants ; nous nous rabaissons jusqu’à eux au lieu de les élever jusqu’à nous, car enfin cette richesse prometteuse du texte libre ne saurait être que l’exception.
Nous aurons rarement un choix suffisant de textes, car nos élèves n’aiment pas travailler quand on ne les y oblige pas, et ils sont bien vite à bout de souffle. Ou bien alors, ce seront toujours les mêmes qui feront les textes, ce qui n’est qu’une solution de surface.

https://www.icem-pedagogie-freinet.org/bibliotheque-de-l-ecole-moderne-n-3-le-texte-libre

Je suis en parfait accord avec cela et me le rappelle régulièrement pour ne pas me laisser tenter par les sirènes aveuglantes du programme.

Je vais vous expliquer comment je pratique en classe.

Qu’est-ce qu’un texte libre?

Tout texte issu d’un enfant est, pour moi, acceptable. Un titre d’œuvre, un texte court, long, un exposé, une fiche de préparation etc…

C’est important que l’enfant comprenne que tout ce qui lui permettra de communiquer avec quelqu’un ou lui-même fait parti de la culture écrite. J’essaie, dans la mesure du possible, d’ôter toute attente de ma part, afin que l’enfant soit libéré de toute contrainte de l’adulte.

Pour moi, c’est le point de départ indispensable à un formidable chemin vers l’expression profonde des enfants.

La correction

Dans la classe, nous avons de nombreux outils permettant à l’enfant de se corriger: dictionnaires, Bescherelle, fichiers autocorrectifs, mots personnels, mots de la classe, Photimots, etc…

Les enfants peuvent tenter de se corriger grâce à ces outils, peuvent demander à un camarade de les aider ou alors demander à l’adulte quand il le souhaite.

Si l’enfant veut que son texte soit publié il doit le montrer à l’adulte qui commencera une correction en relation duelle. L’adulte lira ce qu’il lit et signifiera les erreurs selon l’avancée de l’enfant. Il manque une marque du pluriel, il la corrigera en explicitant la règle ou l’intérêt de cette marque.

Si c’est une erreur d’orthographe l’adulte demandera à l’enfant de chercher le mot dans le dictionnaire et notera le groupème 1. L’outil la grammaire en 4 pages2

Le texte, une fois corrigé, doit être recopié à la main, pour que l’enfant puisse s’imprégner ({note]Terme de Paul Le Bohec[/note] de la bonne graphie.

Une fois par jour, l’adulte demande aux enfants: qui a quelque chose à corriger? Seuls les enfants volontaires montrent leur textes, et une fois par semaine, les enfants qui n’ont rien montré doivent passer par la case adulte et correction.

Si un enfant ou un groupe d’enfant n’écrit pas?

Ce n’est pas un problème, selon l’avancée du groupe et la libération de l’écrit, l’adulte réunit les enfants qui n’ont pas écrit dans la journée et leur demande ce qu’ils souhaitent faire pour écrire.

Souvent, les enfants ont oublié, ou alors n’avaient pas d’idée. C’est le moment pour écrire collectivement à l’aide de pratiques simples comme Ah bon! vous écrivez ensemble3 ou le débat libre de dessin4ou d’autres activités de libération de l’écriture.

Rien de grave, étant donné que nous sommes en classe unique, tout le monde a le temps, l’adulte comme l’enfant. Cela donne un état de sérénité important.

Et après…

Et bien cette libération de l’écrit a été fort bénéfique pour tout le monde.

Les enfants écrivent plus que de raison, à n’importe quel moment de la journée, même les moments libres comme le repas. ils s’y retrouvent car ils apprennent les règles importantes du français sans être obligés de passer par des leçons.

Pour ma part je n’y vois que du positif, tout le monde écrit, tout le temps, sans se sentir obligé. Ce n’est que du bonheur de voir toutes ces petites têtes s’exprimer comme ils le font, sans peur d’être jugé. L’écrit devient vraiment libérateur.

Au collège, les enfants suivent tout autant sans avoir subi les leçons interminables et autres joyeusetés scolastiques! Alors laissons libres les enfants d’écrire, ils écriront.

  1. Ensemble de mots ayant un sens, l’important c’est l’affectivité que mettra l’enfant dans SON groupème car issu de son texte
  2. La grammaire en 4 pages
  3. Ah bon! Vous écrivez ensemble !
  4. Le débat libre de dessin

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